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Bien préparer sa future promotion ou intégration au CNRS 2010

lundi 23 novembre 2009, par Eliane Daphy

Nous avons obtenu quelques clopinettes de Dame Pécresse, notre ministre bien aimée, que gloire lui soit rendue éternellement. Dont une augmentation des postes de directeur de recherche 2é classe. Des collègues bloqués en phase terminale comme chargés de recherche CNRS préparent activement leur dossier de promotion. Parmi les pensums obligatoires du Publish or Perish : l’actualisation des listes de références de publications. Et c’est ainsi que l’on voit fleurir sur les pages personnelles des chercheurs sur les sites ouaib de laboratoires CNRS de très jolis "à paraitre", "sous presse". Des listes impressionnantes de "documents de travail". Rien que de très banal.
Une innovation remarquable : j’ai vu passer un "sous presse en ligne", non-disponible sur Internet, ce qui est une nouvelle catégorie tout à fait intéressante de la taxinomie "publications scientifiques". Un ordinateur sous presse, c’est amusant. Passons.
Comme d’habitude, quelques auteurs s’auto-promotionnent en étalant sur internet des références de publications dont ils sont les seuls à connaître l’existence : impossible de les trouver en recherchant sur Google, sur le catalogue en ligne SUDOC (Système Universitaire de Documentation, catalogue collectif français réalisé par les bibliothèques et centres de documentation de l’enseignement supérieur et de la recherche, plus de 9 millions de notices bibliographiques) ou sur la banque de données de la BNF.
Le plus rigolo, c’est lorsque l’éditeur répond à la demande de date de parution de l’ouvrage : "Quel ouvrage ? XXX ne figure pas dans les projets éditoriaux de notre maison". Ou "vous ne pouvez pas nous commander cet ouvrage (référencé "publié en 2009") ; il ne paraitra pas en 2009 car nous n’avons pas reçu le manuscrit de l’auteur".

Un jour, peut-être, émergera une réflexion collective sur l’éthique et la déontologie des référencements en SHS. Un comité d’éthique délibérera pour décider si la mise en ligne sur une page web de laboratoire CNRS (et dans les rapports d’activités des laboratoires, en vue de l’évaluation par le Comité national de la recherche scientifique ou l’AERES, ou dans un CV) de références bibliographiques mensongères est de la triche scientifique. Des sanctions seront peut-être envisagées.
La direction du CNRS, ou la présidence des Universités ou des Hautes Ecoles en Sciences Sociales, s’inquièteront peut-être de ces pratiques qui ne participent guère à leur bonne réputation.
En attendant, explosent sur Internet des pages remplies d’étranges références bibliographiques. Inaccessibles au lecteur, et comme de bien entendu, non déposées en archives ouvertes.
En attendant, les étudiants, doctorants ou collègues continueront à perdre leurs temps à chercher à lire des publications qui n’existent que comme références de publications.
Etrange époque : Lévi-Strauss est mort, et les scientifiques humains et sociaux ont perdu le nord.

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